Notes sur de la zik

Alice M. – Décembre 2021

Yo.

Tain j’ai littéralement repoussé ce truc pendant plus d’un an, et pendant ce temps la liste d’albums grandissait comme un bâtard. J’ai jarté deux trois trucs pour faire genre j’étais pas trop à la bourre. Verrai le reste plus tard. Peut-être.

Vu que j’ai surtout viré des trucs pas forcément accessibles, ça donne un épisode plutôt pépère. Les gens vont finir par croire que je me gave de dérivés de folk à longueur de journée.

Rappels rapides (copiés depuis les épisodes précédents) sur les lecteurs Bandcamp intégrés :

Vous pouvez me prévenir si un album se fait la malle et défonce un des lecteurs. On est jamais à l’abri d’un truc à la con genre une republication et pouf, un « 2 » qui poppe dans l’URL, etc.

PreteriteFrom the Wells

Based on the unorthodox use of traditional instruments from various cultures.

(J’avoue que je galérais pour trouver des paroles à foutre en épigraphe et que j’ai fini par dire fuck et prendre un bout de leur « About ».)

Ça fait genre meuf qui prédit la fin du monde, sorcière moyenâgeuse ou je ne sais quoi, mais genre on est pépère quand même, limite au coin d’un feu et tout. Genre les gens à l’extérieur baddent leur race mais nous on est à la fois costauds et blasés et on contemple et attend. Putain qu’est-ce que je raconte, moi. Bref, chacun se fera sa propre image, je pense. Sais pas. C’est dépaysant en tout cas.

Les mélodies sont étirées dans le temps, on est pas pressé et tout. Bwoooow. Mais c’est quand même moins drone-doomesque et plus accessible (je trouve) que Menace Ruine (tain ce nom, je m’y ferai jamais), où la chanteuse officie également.

Ce n’est ptêt pas adapté à toutes activité, mais j’aurais du mal à pondre un algorithme mental pour décider à quoi c’est adapté, justement, alors je pense que ça serait dommage de pas tester avec des choses et d’autres. Limite j’ai déjà fait du sport dessus, je crois.

harmonicblendYumekatari

Aurora fati nostri veniet, veniet!

Gens qui font soit des trucs inspirés de jeux vidéos (un peu comme ça que je les ai connus, à la base, parce qu’ils se tapaient des trips sur une de mes séries fétiches, à savoir Ar tonelico), soit, plus tard, des ziks de jeux indépendants (souvent en gardant un petit quelque chose, niveau style, de leurs délires initiaux).

Faut un peu accepter le côté « DIY », même s’ils sont de plus en plus pros à force d’être sollicités pour des jeux. Ptêt qu’il faut un peu de temps pour rentrer dedans, aussi. Sais pas. Toujours est-il qu’il y a pas mal d’idées cool ici et là.

Sur certains albums ils abusent un peu des imitations de chœurs bulgares, ce qui n’est selon moi pas vraiment là où ils excellent. Là c’est un peu plus équilibré.

Je me suis surtout attaché à la seconde moitié de l’album, qui donne peut-être davantage la patate, mais ça ne veut pas dire qu’il faut bouder le reste.

Foutre du latin et du japonais dans la même piste, c’est assez wtf au fond, mais OK. Les délires linguistiques ont toujours été dans leur ADN, pis si on y fait pas gaffe à outrance ça passe tout seul.

Esben and the WitchOlder Terrors

Come with me, to the place where the wolves await.

Sous couvert de minimalisme et de répétitions, ils construisent au fil de chaque morceau des couches et de l’intensité qui justifient la classification de post-rock, que l’ont pourrait initialement être tenté de balayer d’un revers de main en disant « boarf il y a une meuf qui fait ooh ooh et des arbres, c’est limite juste du folk ou sais pas quoi, non ? ».

Ça reste néammoins plutôt contemplatif ; pas forcément le délire de tous. En même temps les trucs qui sont le délire de tous et qui sont pas claqués au sol c’est rare et pas toujours si rigolo au fond.

Par contre je ne vais pas mentir (comme d’hab) : j’ai du mal avec leurs autres sorties. Cet album, que je trouve bien au-dessus du lot, me suffit amplement. Mais j’aime beaucoup y revenir. Je ne me lasse pas de la fin ouf de la première piste, et la suite vaut le détour aussi. Ça finit d’ailleurs en beauté avec la dernière piste, « The Reverist », qui me donne cette impression bizarre de « c’est comme si on avait toujours connu ce morceau mais qu’on l’avait oublié ; comme s’il était déjà là, quelque part en nous ». Une sensation cheloue qui se lie très bien avec tout cet univers à base de « yo on va faire des rituels chelous dans les bois autour d’un feu pis il y a des loups qui vont danser la javanaise à côté ».

Boreal HymnTundra

A song for those who slid lifeless down the blade.

Une approche un brin plus moderne (mais pas trop non plus, pour pas que ça soit anachronique as fuck) vis-à-vis des trucs enneigés et des gens qui se foutent sur la gueulent dans des civilisations d’il y a des plombes.

Les mecs ils appellent ça une démo mais ça met la misère de sa vie à pas mal de « vrais » albums de projets plus notables que j’ai pu croiser. Pas pour rien que je fous ça ici d’ailleurs. Par contre on attend toujours la suite et je sens qu’on l’attendra longtemps, d’autant plus que les mecs ont d’autres projets plus populaires à côté. Genre en fait c’est un duo composé du chanteur de Seer et d’un mec qui joue en live avec ces derniers.

Le chant et les mélodies rappellent vite fait tous les machins à la sauce viking genre Árstíðir Lífsins (ouais j’avoue que dans ma tête ce groupe s’appelle « Aristide Linfigraine », et pour le retrouver j’invoque la puissance de mon clavier bépo pour filtrer ma collection avec un « ð » ; fin de l’aparté) et euh merde j’en étais où. Ouais genre ça et les trucs avec des mecs de Wardruna ou Enslaved, genre ce que j’avais déjà présenté il y a… putain je suis vieux. Ça, là. Mais bref, ici il y a une imagerie quand même moins ostentatoire, moins « prends-toi ça dans la face », et on peut un peu mieux imaginer ce qu’on veut.

The Lion’s Daughter × Indian BlanketA Black Sea

Only a prince is scared of carrying a crown.

Collaboration aussi improbable que le degré auquel elle a fonctionné.

The Lion’s Daughter pond du sludge, avec anciennement des influences plutôt black et maintenant des délires indus et darksynth. Indian Blanket, c’est plutôt rock acoustique et folk, genre mec dans la pampa. Autant, à première vue, foutre de la pâte à tartiner sur des courgettes, quoi.

Chacun laisse de la place à l’autre pour s’exprimer, mais poppe ici et là en mode yin et yang. Certaines pistes voient l’un des deux acteurs s’effacer quasi complètement, comme Song for the Devil qui est très pépère, ou au contraire Swann qui tabasse pas mal.

C’est globalement très couillu, car chacun des projets prend le risque de perdre ses propres fans (mais la somme des deux peut aisément en gagner de nouveaux). Par contre, The Lion’s Daughter est déjà relou de ouf à classer quand ils sont seuls, alors là… D’ailleurs je suis moins fan de ce qu’ils ont fait seuls (avec leur esthétique cheloue limite façon Mora Prokaza, haha). Bien que l’idée de la collaboration est perchée, je trouve que c’est le truc le plus accessible dans les sorties de The Lion’s Daughter. Le reste est un peu trop « indus » pour moi, d’ailleurs, avec l’impression qu’il y a eu absorption de substances cheloues et tout, même si en vrai aucune idée. Cela dit, je crois que j’ai pas testé les trucs très vieux, qui ont l’air un peu différents ; faudra que je vois ça.

On est dans une contemplation ébahie mais sombre et un peu pessimiste de la nature, je trouve. Genre c’est tout niqué mais il reste quand même des trucs à kiffer et tout pis c’est cool yo. Dans That Place, on est même limite en train de pêcher des truites dans le Colorado, quoi.

KardashevThe Baring of Shadows

Across from me, an empty frame… but light against the wall.

Si vous songez à faire un jeu de mots à la con sur la famille Kardashian, je vous arrête tout de suite, ça a déjà été fait à gogo et ça vieillit vite.

Accroché vite de ouf. Une de mes découvertes les plus troueuses d’arrière-train de ces dernières années. Content de les avoir connus avant qu’ils signent sur Metal Blade, ça me donne l’impression d’être grave cultivé haha (par contre je me suis fait un peu niquer car c’était avant la réédition avec version instrumentale).

Chanteur absurdement versatile ; sur mes découvertes des trois dernières années j’ai à la rigueur juste croisé le mec de Iotunn qui fait ce genre de trucs (même label, tiens), et encore.

Sur tout l’EP il n’y a que l’intervalle 1:15–1:16 de la piste 2 que je n’aime pas trop. Genre une ou deux secondes. C’est dire. Le reste n’a pas de prix à mes yeux. Ils ont fait des transitions sympas entre certaines pistes, et ça évite l’effet « deux trois miettes éparses pour l’apéro » qu’on a sur certains EP : là on a affaire à un truc un peu plus cohérent et consistent, même si la longueur reste… bah celle d’un EP, quoi. Ça rassasie pas mal. Pis on peut se le passer assez souvent sans trop d’indigestion. D’ailleurs j’ai tant écouté ça en jouant à Yakuza 0 que maintenant les deux sont liés dans ma tête alors que ça n’a genre rien à voir de chez rien à voir.

Je suis hypé de ouf pour la suite, surtout maintenant qu’ils ont un label sympatoche derrière eux, et une base de fans grandissante.

BjörkVespertine

On the surface simplicity, but the darkest pit in me.

Ça faisait longtemps que j’entendais ce nom mais je n’avais pas testé.

Soudain elle a plus ou moins tout fait popper sur Bandcamp ; j’suis allé voir sur RateYourMusic ce qui était bien noté car je ne savais pas par quel bout prendre ce mastodonte ; j’étais un peu intimidé. J’suis tombé sur Vespertine, un de ses albums avec la pochette la moins creepy.

En fait, il est pas juste bien noté, cet album : à l’heure ou j’écris ça, c’est le numéro 1 sur RateYourMusic pour l’année de sa sortie, à savoir 2001. Il bat ainsi de peu des gens comme (je donne ceux qui me parlent le plus) Daft Punk, Tool, Converge, Opeth, Radiohead, ou System of a Down, qui ont tous tapé assez fort à cette époque, et qu’on retrouve derrière.

(Ça me rend toujours aussi ouf nos médias à la con qui nous balancent quarante chanteuses clonées en ignorant des meufs avec un peu plus de personnalité et versatilité qui ont plusieurs décennies de carrière, tain. Tout ça pour mieux traire les gens.)

Au cœur de la jungle classificationiste associée à cet album, on trouve le terme de « microsound ». En effet, c’est blindé de petit « chplik chplik » et autres « tipipip » subtils, conçus et placés avec adresse. C’était un peu nouveau, pour moi.

C’est plutôt doux et amical mais pas si naïf qu’on pourrait le croire. Les dents et blessures sont juste un peu cachées, dans des profondeurs pas toujours soupçonnées, sous le côté « boîte à musique ».

The Moon and the NightspiritMetanoia

The group’s new work builds on its alluring, fairytale-esque explorations.

Tain mais c’est la chanteuse qui a pondu cette pochette, raison initiale pour laquelle j’avais testé ce truc ? Ils tiennent vraiment tous à me faire répéter que les artistes de niche (que Spotifist et consorts font allègrement crever à petit feu) sont souvent mille fois plus méritants que les gens random qui se font mousser et qualifier de « véritables phénomènes » en fin de journal télé sur M6 via d’obscurs pistons.

Bon bah là c’est pas un mélange ou quoi, c’est du néo-folk, quoi, pis voilà. J’crois. Ils se tapent un délire sur un univers à eux et utilisent je sais pu trop quelle·s langue·s. Pas trop besoin de tergiverser, ça se boit comme du petit lait (végétal, sinon je vais roter pendant trois jours).

Encore un truc qui me rappelle des bandes sons de jeux, mais en même temps faut dire que tous les trucs vaguement dérivés du folk et remis à la sauce du jour, c’est courant dans les jeux. C’est plutôt moi qui découvre les trucs en sens inverse, donc, on va dire.

Seul bémol que j’ai trouvé (en achetant quand même trois albums) : une voix masculine qui poppe ici et là sur les titres plus anciens, et qui n’est pas forcément toujours au top ou utilisée à bon escient.

AhabThe Boats of the Glen Carrig

If we’d only known it was sheer madness, we’d stay away many a nautical mile…

Funeral doooOOOooOOOoom~

Putain font chier c’est vrai que le label n’a foutu qu’une zik en écoute sur Bandcamp, sont teubés (ou bien trucs légaux à la con ?). Et même en l’achetant, la piste bonus ne poppe que quand on télécharge l’album. Nawak. Bon bref j’arrête de rager et je souille ma page avec du YouTube.

Tiré d’un bouquin un peu ésotérique et tout. « The Boats of the “Glen Carrig” », écrit dans un style un peu archaïque et chelou, raconte comment des mecs ont survécu après s’être scratché au milieu de nulle part avec leur navire, au milieu de monstres sur lesquels on a peu d’explications. Et pis, même le nom du groupe, c’est le vieux grincheux qui a un peu perdu la boule dans Moby Dick et veut oblitérer la giga-baleine de la popocalypse. Les paroles (ptêt tirées en partie du bouquin ?) imitent d’ailleurs le style vieillot / maritime que j’ai pu croiser dans Moby Dick ou The Saga of the Bounty.

On est ici gratifiés de gros « GROUUUUUUU » surnaturels, surtout qu’ils poppent souvent après des lamentations plus classiques, limite envoûtantes bien que tristounettes. Pis gros riffs de phacochères à en faire trembler les meubles, tandis qu’à d’autres moments c’est de la berceuse acoustique. C’est assez ouf, les transitions et la maîtrise des deux aspects. La piste bonus, tout à la fin, en sixième position, est complètement en chant clair, en finesse et en émotions, et le groupe s’en sort très bien là aussi.

J’ai trop utilisé cet album comme réveil pour le boulot, par contre, haha.

Thou × Emma Ruth RundleMay Our Chambers Be Full et The Helm of Sorrow

Just another endless nightfall around me, just another fucked up thing I can’t save.

Ces derniers temps il y a eu pas mal de collaborations inattendues entre des trucs que j’apprécie. Souvent catalysées par l’écosystème du festival Roadburn.

J’avais déjà parlé d’Emma Ruth Rundle, d’ailleurs, je crois. Ah, oui, dans zik_janvier_2018, mais il y a limite pas de sections dans ce truc de l’avant-guerre. Bref. Ses trucs solos sont assez pépères, et c’est magique à voir en concert. Là, il y a les blackened-sludgeux de Thou qui se greffent dessus et ça donne une ambiance assez différente, même si chacun arrive à conserver un gros gros bout de son identité. Ça marche plutôt bien.

Thou a quelques particularités, outre ces pochettes façon vieilles gravures. Genre leurs paroles ne ressemblent pas trop à des paroles mais plutôt à des mini essais politiques rageux. D’ailleurs ils sont souvent présentées en paragraphes en mode yolo plutôt qu’en espèces de vers.

L’album est un poil court, mais ils ont ajouté un EP sur la table quelques temps après. Avec une reprise des Cranberries, haha.

Voilà

Je rappelle qu'une bonne partie de mes récents achats de musique sont ici, si jamais vous n'avez vraiment rien à foutre :
https://bandcamp.com/alice_m

Et pour le reste :
https://www.alicem.net

Bonne journée.