Notes sur de la zik
Alice M. – Septembre 2019
Tain, j’ai des photos à traiter mais aussi une envie pressante de balancer de nouveau quelques lignes sur de la zik plus ou moins aléatoire. J’aime bien me replonger dans ce que j’ai, jeter un œil sur des paroles, faire un peu de css… Le menu est relativement varié, même s’il y a toujours matière à s’étaler davantage.
Rappels rapides sur les lecteurs Bandcamp intégrés :
- Je les cale sur une piste que je veux mettre en avant, donc si vous laissez la lecture se dérouler, vous arriverez à la fin de l’album sans forcément en avoir entendu les premières pistes.
- Si tout va bien, ils se mettent automatiquement les uns les autres en pause quand l’un démarre.
LetheThe First Corpse on the Moon
Aeons of creeping decay
Les gens passent leurs temps à faire « gnagna au fait y a une ancienne meuf d’Eluveitie », mais on s’en bat un peu la race, en vrai, car là on a un genre de trip-hop ou sais pas quoi qui n’a rien à voir.
Certaines pistes me marquaient nettement moins au début (approche vocale parfois un peu osée, ambiances cheloues…), mais j’ai appris à mieux les connaître et maintenant l’album entier passe comme une lettre à la poste. La plupart des pistes, même si on ne sait pas trop ce qu’elles racontent, sont vachement évocatrices et invitent à s’inventer des histoires tordues.
SólstafirÓtta
Svo há! Hún var svo há! En tunglið lýsti leið, já tunglið há…
Cinq ans presque jour pour jour après sa sortie, cet album reste un des éléments les plus poignants, touchants, appelez ça comme vous voudrez, de ma collection. En même temps, les Islandais, ils trichent. Je sais pas comment, mais ils trichent.
Chaque piste est dédiée à un moment de la journée, par ordre chronologique. Sur celle que je fous là, on approche de la fin.
Ce truc m’a surgi spontanément en tête quand je me suis retrouvé sur une plage désolé à Tottori, au Japon, avec un vent complètement abusé dans la tronche. Il faut dire que le clip vidéo est dans cet esprit-là, plus ou moins, aussi.
La Torture des TénèbresIV – Memoirs of a Machine Girl
What were you gaining from helping me through all this time? Yet deep down, I was too afraid to hear your answer, because deep down, I already knew. It's such a shame and such a pity that you aren't even real…
Tiens ? Je n’ai pas encore osé vous balancer du La Torture des Ténèbres ? Une Canadienne bizarre, qui semble pas mal s’inspirer de la littérature style Asimov et du « rétrofuturisme » de manière plus générale.
La pochette suffit à me donner des frissons. Les titres suffisent aussi à m’en donner. C’est vraiment un truc à part, depuis bien des points de vue. Certains diraient probablement que c’est limite le truc le moins accessible de ma collection et je ne leur en voudrais pas. Pour ma part, je trouve que quand le bordel atteint un certain point, il nous prend tellement de force, nous bouffe tellement, que l’effort mental à effectuer s’en trouve amoindri. Et puis, il finit par se bouffer lui-même. Comme une planète massive déchire sa surface via sa propre gravité. Cet artiste est même classifié comme « ambiant ».
Certains passages plus pépères, avec leurs samples et échos, me rappellent les piscines publiques intérieures bondées. Un soir de match de coupe du monde de foot, alors que je me sentais seul en pleine ville pleine de gens qui pétaient pas très rationnellement des durits, je me suis passé cet album dans le noir, la fenêtre ouverte. La réalité et la musique se mêlaient et m’enveloppaient tout entier. Le genre de moment qu’on ne peut pas trop reproduire. C’est aussi pour ça que j’amasse de la musique : cela trace le chemin de ma vie, avec ses moments marquants et ses résonances.
EfDelusions of Grandeur
He's grabbing me by the hair, dragging me through the woods, promising me a proper punishment… but I knew I did the right thing.
Comme pertinemment exposé par les mecs de Pelagic Records, ces gars peuvent aussi bien convaincre des post-rockeux que des métalleux. Il y a une certaine forme de puissance dans leur pépèritude. Et d’ailleurs le gars qui me les a « présentés » n’a pas une intersection de oufdingue avec moi niveau zik.
Même s’il n’y a thématiquement absolument rien à voir, ce morceau m’a hanté quand je suis passé dans les trucs liés à la bombe à Nagasaki.
Certains albums du groupe souffrent de certaines longueurs. Ici, on a un EP, donc c’est un peu plus poli, condensé. Ça finit par me marquer limite plus que les vrais gros albums qu’ils ont pondus. J’suis pas mal attaché à ce « Delusions of Grandeur ».
Le post-rock est un genre inondé de groupes pourris, oubliables, qui tentent d’imiter quelques figures de proue. Je range Ef parmi ces figures.
Homestuck
The percentage of probability is simultaneously bananas and through the roof. A complete disgrace of tropical fruit erupting from the peak of an unassuming domicile.
J’vais aller en enfer si je fous pas au moins un truc sur Homestuck sur mon site. Le truc qui « n’est pas un jeu mais a une meilleure bande-son de jeu que la plupart des jeux ».
Edit : Oh tain c’est le bordel ils ont soudainement fusionné des albums (et baissé les prix) et tout.
Un beau jour, je suis tombé au pif sur ce fichu album de près de deux heures dont quasiment toutes les pistes me semblent excellentes. J’ai failli ne même pas le tester car il était évident qu’il s’agissait d’une sorte de bande-son et que j’étais le seul mec dans le coin à ne pas piger de quoi ça parlait. Je me suis quand même lancé, et après les premières claques j’ai fouiné sur Wikipédia.
Homestuck est un webcomic racontant, sur environ 8000 pages, une histoire tordue avec sa propre logique interne perchée (dans laquelle les paradoxes temporels ne sont pas un fléau mais au contraire la norme), un humour bizarre, des références culturelles diverses, un anglais manié de manière atypique, etc. Ce n’est clairement pas pour tout le monde et il faut quelques quarts d’heure pour entrer dans le bon état d’esprit et accepter certains trucs. Pour ma part, c’est depuis des mois (j’ai pas encore fini l’histoire) « le truc vers lequel je sais que je peux revenir le soir si j’vais pas bien ». Ça m’a aussi rattaché à ma vie « normale » quand j’étais au Japon, seul dans un train (pas toujours le bon) ou dans une chambre d’hôtel.
C’est un genre d’œuvre collaborative, qui contient, en plus du texte et des images, pas mal de vidéos et même des petits jeux. Dans ce cadre, des chiées de gens ont pondu des ziks, parfois comme partie intégrante de l’histoire mais aussi parfois simplement comme un genre d’hommage. Le volume 10 de la bande-son est d’ailleurs entièrement paru après la fin de l’histoire et reprends des thèmes musicaux récurrents en y mettant souvent pas mal de patate. C’est assez varié, il y a à boire et à manger. Si vous avez le temps, jetez une oreille à « Ascend » ou au jazzy « Moonsweater », par exemple, ou simplement à la monumentale intro de l’album.
Godspeed You! Black EmperorSlow Riot for New Zero Kanada
Recorded at the gas station in Toronto, Ontario, Canada
Diantre. Juste : diantre. Je trouvais déjà que cette piste avait quelque chose de spécial, mais en effectuant quelques recherches pour ce document, j’ai découvert à quel point.
Les voix que l’on entend sortent d’une interview vraisemblablement menée par un membre du groupe qui interroge un mec manifestement pas super stable. Le mec en question, américain, critique les États-Unis, accuse les autorités de mentir, etc. Soit. Mais il raconte une histoire cheloue genre qu’il était au tribunal pour un excès de vitesse et qu’il a plus ou moins gueulé arbitrairement sur le juge en le prenant de haut. Pis bien sûr le mec possède des chiées d’armes à feu. Pis il se fait appeler Blaise Bailey Finnegan III en référence au mec qui à l’époque était chanteur d’Iron Maiden. Pis il dit qu’il écrit des poèmes et en récite un, mais en fait c’est limite en entier des paroles d’Iron Maiden, justement.
Ce groupe, ou plutôt collectif, est mystérieux et expérimental comme pas permis, et de manière assez marquée pour du post-rock, et avec cette histoire ils me mettent encore une fois sur l’arrière-train.
Youngblood Brass Band20 Years Young
All re-mastered for your aural enjoyment.
Ensemble de cuivres dont un ami jouait des morceaux à la trompette quand j’étais à la fac. Souvenirs. Compilation pour leurs vingt ans. Orgie de trucs abusés.
Ils partent un peu en couilles, à des moments. Ils peuvent aussi bien exploiter leurs compétences techniques pour faire des interprétations (et compositions, et improvisations) propres que pour faire des trucs perchés. Un gros esprit de partage, de bonne humeur et de communion traîne aussi tout le long.
A State of MindThe Jade Amulet
Only the wicked shall fall
J’l’ai pas mal raconté irl : en croyant avoir affaire à du métal parlant de vikings, je suis tombé sur du hip-hop parlant de samouraïs. Et ça m’a tant botté le derrière que j’ai acheté l’album le lendemain.
Les mecs ont pondu, avec des tas d’invités et un mini-orchestre, une « odyssée hip-hop cinématique », conçue pour être jouée de manière plus ou moins théâtrale. Il y a une diversité d’ambiances de maboul tandis que l’album suit, au fil des pistes, la vie du personnage principal : une voix de marmot pour son enfance, de l’arrogance à la pelle à l’adolescence, des cuivres martiaux lorsque les choses se gâtent, etc. Oh et il y a aussi une espèce de BD de quarante pages qui peut être vendue avec l’album, avec, je crois, les paroles en guise de texte. C’est triste que des gens perdent leur temps avec des rappeurs écervelés quand il existe des diamants comme ça.
SaorForgotten Paths
Though rains may thrash on us, the great mists blind us, and lightning rend the pine-tree on the hill, yet we are strong, yet shall the morning find us, children of tempest all unshaken still.
Le retour du mec qui me donne envie d’aller me balader en Écosse.
C’est aussi un retour à mes vieux amours : le black atmosphérique qui se paluche devant montagnes et forêts. À noter l’intervention du bon vieux Neige (il est partout en ce moment) sur cette piste.
Je n’ai rien de bien ouf à ajouter. Comme disait un collègue, « le riff du début est patate », et j’ai hâte de voir ça en concert à la fin de l’année. L’album est sacrément court mais la qualité y est d’autant plus concentrée.
ThroanePlus une Main à Mordre
Je ne me suis jamais senti bon, en confiance. Mais je me suis toujours lancé.
Dehn Sora, ou Vincent Petitjean de son vrai nom, est au moins figurativement hyperactif. Non content d’illustrer et de photographier pour ses potes de Blut aus Nord (et plus généralement pour un peu tout Debemur Morti Productions), il compose et interprète aussi des trucs. En l’écoutant, on voit tout de suite pourquoi il s’entend bien avec le groupe que je viens de citer : c’est oppressant et un brin industriel.
Ouais, encore un truc qui donne l’impression qu’on est en train de crever. Enfin moi ça me donne des frissons de ouf et limite envie de pleurer, surtout ce morceau qui clôt cet album éprouvant.
Dehn Sora dit (dans des interviews assez cool) qu’il a toujours un peu galéré pour s’exprimer avec des mots, donc il pond une chiée d’autres trucs… et chante parfois dans « une langue instinctive, une langue sonore ».
Sur le plan musical, il est plutôt attaché aux choses directes, honnêtes, vraies, dans lesquelles l’artiste se lance tout entier (si j’en crois ce que je lis ici et là). Il a, dans ce cadre, pas mal baigné dans le black metal. Le « sans concession » que la Fnac fout sur 99 % des œuvres musicales (pff…) ne serait ici finalement pas de trop.
Fall of Efrafa
All the world will be your enemy, prince with a thousand enemies. And whenever they catch you, they will kill you. But first, they must catch you, digger, listener, runner, prince with a swift warning. Be cunning, and full of tricks, and your people will never be destroyed.
Si on m’avait dit qu’un jour je tomberais par hasard sur un groupe d’un de mes styles préférés dont l’œuvre serait intégralement inspirée par un roman dont les personnages principaux sont des lapins…
… Et pourtant, le groupe maintenant disparu Fall of Efrafa a bien pondu trois albums (bien notés) sur Watership Down, livre de Richard Adams que j’ai depuis acheté et presque fini. Du post-sludge / post-hardcore juteux quoiqu’au chant perfectible, avec des compos pour les gens qui savent se poser et être patients. Maintenant que j’ai bien avancé dans le bouquin, les titres des morceaux suffisent à me faire ressentir des trucs.
Dans l’histoire, Efrafa est une garenne dont le chef est une brutasse. Ce lapin, par peur que ses congénères et lui soient découverts par des humains ou contaminés par une maladie quelconque, régule tout de manière totalitaire, avec l’aide de ses « officiers ». On comprends pourquoi ce groupe a signé sur un label antifasciste…
Mare CognitumAn Extraconscious Lucidity
If the sky could speak, and hear the earth, and mend the stars…
Le métal inspiré par l’espace, c’est pas ça qui manque. Y a du bon et du moins bon, et plusieurs approches bien distinctes. Contrairement à Darkspace qui oppresse de ouf, Mare Cognitum fait plutôt dans le contemplatif et le majestueux.
Après être passé à côté du projet pendant plusieurs années, je suis revenu dessus, j’ai testé genre même pas deux albums, et j’ai acheté toute la discographie. Bonne surprise : il y a une bon dieu de putain de collaboration avec Spectral Lore qui traîne au milieu. Mais de toute façon quasiment tout ce que pond ce mec est encensé, et à juste titre.
Voilà
Douze trucs, ça fait déjà pas mal. J’en ai déjà douze autres de côté pour un autre jour, d’ailleurs.
Je rappelle qu'une bonne partie de mes récents achats de musique sont ici, si jamais vous n'avez vraiment rien à foutre :
https://bandcamp.com/alice_m
Et pour le reste :
http://www.alicem.net
Bonne journée.